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L’ultime écran de fumée contre la stagflation

By 13 décembre 2021janvier 23rd, 2023No Comments

Philippe Béchade est formel : si la stagflation n’est pas encore là, elle approche à grands pas. Or, la capitalisation hors normes des GAFAM masque l’établissement durable de l’inflation

 

Le « trou d’air » du 26 novembre a été définitivement comblé dès ce vendredi 10 décembre par le S&P500. Il n’aura même pas entretenu le suspense plus de 24 heures sur l’inscription d’un nouveau record de clôture (+0,95% à 4 712 points) alors que les 4 700 points avaient été retracés la veille de la publication du CPI.

Le Dow Jones a renoué de son côté avec les 36 000 points, inscrivant sa meilleure clôture depuis le 16 novembre dernier, surpassant – tout comme le S&P500 – son score final du 24 novembre.

Si le Nasdaq n’a pas suivi la cadence imprimée par les indices historiques les 9 et 10 décembre, c’est à cause du plongeon des « labos » comme BioNtech (-10% vendredi et -25% sur la semaine) ou Moderna (-6% et -17% sur la semaine).

Mais ces replis ont été plus largement compensés par le +2,8% d’Apple à 179,5 $ qui a rajouté près de 300 Mds$ de capitalisation sur la semaine écoulée, soit 2 915 Mds$. C’est 10% de plus que le PIB de la France anticipé fin 2021, et seulement si la croissance atteint effectivement +6,7%.

Apple a rajouté 675 Mds$ de capitalisation depuis le 1er janvier 2021 : c’est autant que 492 autres entreprises du S&P500 cumulé.

Mais surtout, les GAFAM (11 200 Mds$ de capitalisation) compensent à elles seules le décrochage de -25% à -85% de 50 composantes du Nasdaq-100 depuis leur zénith annuel, soit leur sommet estival.

Et au sein du Nasdaq composite, 30 valeurs seulement sont au zénith, un bon tiers (plus de 800 sur 2 440) évoluent en-deçà de leur MM200… C’est du jamais vu !

Apple, dernier rempart ?

Mais Apple écrase à son tour le top 5 (les GAFAM) avec +36% de hausse cette année, et surpasse désormais de 31% la capitalisation de l’ensemble des 9 000 crypto-actifs listés par Investing, laquelle culmine à 2 225 Mds$.

C’est le résultat d’un « effet de ciseaux » puisqu’Apple a pris +8,5% sur la semaine tandis que pas moins de trois des dix plus importantes cryptos ont perdu plus de 20% sur la semaine (Solana, Cardano, Polkadot)… Notez que le numéro 10, le Dogecoin a chuté de 16,5%. En comparaison, le Bitcoin limite la casse avec tout de même un -10,5% et l’Ethereum, -5%, tout en gardant le contact avec les 4 000 $.

La leçon que nous tirons des huit premières séances du mois de décembre, c’est que la mécanique haussière des onze mois précédents s’est apparemment réenclenchée. Après le 26 novembre, les indices boursiers peuvent filer le cœur léger et la fleur au fusil vers l’établissement de nouveaux records avant le 17 décembre pour inscrire une séance des « 4 Sorcières » au plus haut de tous les temps…

Mais beaucoup de petits – ou moyens – détails trahissent des ratées dans la belle mécanique haussière qui prévalait du 10 octobre au 24 novembre.

Tout d’abord, la détente des taux sur deux mois, malgré une inflation à 6,8% (cf. le « CPI US » publié le 10 décembre) n’est pas une si bonne nouvelle : des taux réels négatifs de plus 500 points aux Etats-Unis, c’est le marqueur – et cette fois – le signe précurseur d’une récession.

Le pouvoir d’achat des ménages américain et européens ne va pas suivre avec 4,9% d’inflation en « CPI Core » aux US et 5,2% en Allemagne – d’où un coup d’arrêt à la croissance – et des entreprises qui ne pourront plus profiter des chèques fédéraux et du « quoi qu’il en coûte » pour faire passer des hausses de tarifs qui en aucune autre circonstance n’auraient pu être digérées.

Car c’est bien le contribuable qui garantit les dettes fédérales (ou euro-fédérales) qui ont permis de soutenir le consommateur en 2020 et 2021. Mais en 2022, ce sera terminé : la FED et la BCE savent qu’elles ne peuvent plus monter les taux. En effet, la « bulle de tout » exploserait. Mais les banques centrales savent également qu’elles ne peuvent plus « ne rien faire » et leur seule échappatoire, c’est le resserrement progressif du robinet de liquidités.

Mais comme elles n’ont rien fait depuis que l’inflation a franchi le cap des 2% en mars dernier, elles ont pris tellement de retard que la bataille est perdue d’avance. Nombreux sont les opérateurs « influents » de Wall Street qui commencent à se ranger à l’avis que la FED de Jerome Powell a commis « l’erreur du siècle » en s’accrochant au narratif de « l’inflation transitoire ».

Une « erreur » qui aura toutefois enrichi Wall Street au-delà de toute proportion imaginable.

Cela résume tout l’esprit de l’époque : faire pression sur la banque centrale, la pousser à la faute en faisant semblant de croire à son infaillibilité, en profiter cyniquement… puis dénoncer son manque de clairvoyance.

La FED et la BCE avaient retourné la situation en leur faveur au quatrième trimestre 2008 en se parant des habits de « sauveurs du système » (qui avait tout à y gagner).

Mais est-ce que le « système » y gagnerait cette fois ?

La seule échappatoire pour les banques centrales serait un « incident » exogène qui leur ôteraient toutes responsabilités du désastre à venir si la croissance ralentit soudain tandis que la hausse des prix apparaît pour ce qu’elle est devenue : durable, et peut-être d’ores et déjà incontrôlable.

Ce scénario s’appelle « stagflation » et c’est le cauchemar des marchés… et Apple semble constituer l’ultime écran de fumée contre la baisse de Wall Street qui, selon nous, a déjà commencé.

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