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Dans un contexte de rivalité où la Chine fait la course à la suprématie technologique, les Etats-Unis mettent tout en œuvre pour tenter de conserver leur position dominante à l’échelle mondiale.  Si les divergences idéologiques et politiques entre les deux pays ne font plus de doute, il faut savoir que le secteur des technologies est lui aussi en train de se scinder en deux marchés séparés.

 

L’écosystème technologique autrefois mondial est aujourd’hui en pleine scission : un véritable « Rideau de Silicium » est en train de s’abaisser sur la scène numérique.

A l’époque de la Guerre froide, le Rideau de Fer – défendu par des chars, des armes et des avions de combat – a scindé l’Europe et une bonne partie du monde en deux territoires politiques qui se faisaient face.

Désormais, un Rideau de Silicium scinde en deux l’univers des technologies en raison de la concurrence sino-américaine en matière de puces.

Avec le gouvernement Biden, un nouveau cap a été franchi en vue de dissocier les Etats-Unis et la Chine dans le domaine des technologies de pointe. Les Etats-Unis ont décidé de limiter l’accès des Chinois aux ressources américaines, notamment dans le domaine des semi-conducteurs, de l’informatique quantique et de l’intelligence artificielle (IA).

Ces mesures interviennent après le blocage des ventes de machines de fabrication de puces et de semi-conducteurs innovants à la Chine, notamment les équipements de production les plus avancés et les puces d’IA Nvidia les plus performantes.

Mais l’apparition de ce Rideau de Silicium bloque les transferts technologiques dans les deux sens. On l’a vu avec l’interdiction aux Etats-Unis des équipements de communication 5G chinois (et même des smartphones).

 

Les puces sur le champ de bataille

Les technologies informatiques avancées ont de multiples usages. Une même technologie qui fait fonctionner des réseaux sans fil hyper rapides et l’intelligence artificielle conversationnelle peut également être utilisée militairement dans les domaines du renseignement, de la surveillance, des systèmes de guidage et bien d’autres choses encore.

Nous l’avons vu avec la guerre en Ukraine : même des technologies standard bon marché et généralistes peuvent rapidement être détournées et avoir des conséquences dévastatrices.

Comme les Etats-Unis l’ont appris pendant la Guerre froide, avoir le dessus dans le domaine des technologies de pointe offre souvent l’une des clés de la victoire.

La Chine a appris cette leçon, elle aussi, et riposté en interdisant l’utilisation des composants fabriqués en Occident dans les applications d’infrastructures de réseau sur son territoire, pénalisant ainsi le marché de l’Américain Micron dans ce pays.

Plus récemment, Pékin a également instauré des restrictions d’exportation sur des métaux technologiques tels que le gallium et le germanium, pour tenter de paralyser la concurrence étrangère.

Dans ce contexte ultra-concurrentiel, les fondements du secteur technologique – à savoir un écosystème mondialisé comptant des centaines de contributeurs, allant des fournisseurs de matières premières aux fabricants d’équipements, en passant par les fabricants de puces, et les concepteurs – se disloquent progressivement.

Cet écosystème a connu un véritable succès, permettant d’obtenir des ordinateurs toujours plus puissants à des prix toujours plus bas. Il a également généré un réseau qui a connecté le monde entier et totalement modifié notre économie à partir des années 1990. Mais aujourd’hui, la réalité est bien différente.

 

 Le progrès technologique menacé ?

Les pressions de la Guerre froide ont contribué à faire naître puis progresser la technologie des puces jusqu’à des niveaux de capacité et de complexité quasi inimaginables. La création des semi-conducteurs et circuits intégrés basés sur le silicium et celle d’Internet en sont les meilleurs exemples.

Ce que nous perdrons, avec cette grande scission technologique, nous le gagnerons peut-être à mesure que la lutte pour s’emparer des technologies les plus avancées passera du simple impératif commercial à un impératif géopolitique.

Les Etats-Unis peuvent être compétitifs. Ils disposent d’énormes ressources en termes d’expertise et de capacités à attirer les meilleurs talents du monde entier.

Des deux côtés du Pacifique, on dépense des centaines de milliards pour acquérir cette suprématie technologique. Aux Etats-Unis, des milliards ont déjà été affectés via les récentes lois CHIPS et Science Act.

En dehors de la Chine, d’énormes usines de puces sont en construction, afin de réduire la dépendance aux semi-conducteurs provenant de Chine et de diminuer – au sein de la chaîne d’approvisionnement – le risque lié aux fournisseurs provenant de pays amicaux mais vulnérables sur le plan géopolitique, à l’image de Taïwan.

Les principaux fabricants de puces américains redoublent d’efforts dans un contexte où les enjeux de cette nouvelle Guerre froide ne cessent de croître. On espère que des puces contenant chacune mille milliards de transistors seront commercialisées d’ici la fin de cette décennie.

Et qui sait, elles porteront peut-être un numéro de série soigneusement gravé et une étiquette mentionnant : « Made in the United States of America ».

 

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