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Des superdividendes pour les valeurs bancaires

By 22 avril 2024No Comments

Contrairement à leurs consœurs européennes qui ont déjà mangé leur pain blanc, les banques françaises peuvent encore espérer une amélioration de leur situation dans les prochains mois, et augmenter fortement les dividendes reversés.

 

Les taux élevés font décidément les affaires des banques, et pas seulement aux Etats-Unis.

En Europe, même avec une Banque centrale européenne (BCE) un peu plus timide que la Fed, les établissements bancaires ont connu un exercice 2023 exceptionnel. Portés par la hausse des taux, les grands noms du secteur ont vu leurs profits s’envoler.

Cette hausse n’a pas été que comptable, elle a directement profité aux actionnaires. Sans même considérer les évolutions des valorisations boursières (par nature changeantes et imprévisibles), les montants directement reversés ont retrouvé un niveau jamais vu depuis la crise des subprimes.

L’an passé, les banques du Vieux Continent ont ainsi reversé plus de 120 Mds€ sous forme de dividendes et de rachats d’actions. Même les banques grecques, qui étaient sommées de conserver leurs liquidités après le sauvetage du système financier du pays en 2010, sont désormais autorisées à reprendre le versement de dividendes.

Partout en Europe, la disparition des taux zéro a permis à l’activité bancaire de retrouver sa rentabilité historique. Maintenant que l’argent et le temps ont de nouveau un prix, l’activité de prêt est de nouveau rentable – et même très rentable.

Si certains analystes imaginent que la baisse imminente des taux directeurs de la BCE va nous faire replonger dans un nouveau purgatoire d’argent gratuit où les prêteurs seront sacrifiés, le plus probable est cependant que la banque centrale ne reviendra pas à une politique de destruction de la valeur de l’argent aussi extrême que dans les années 2010.

Un simple maintien des taux directeurs entre 2 % et 3 % permettrait de répondre aux besoins de stimulation de l’économie réelle, tout en laissant aux banques la possibilité de faire de l’argent avec de l’argent (ce qui leur avait été, en pratique, interdit durant près de 15 ans).

Ces entreprises pourraient retrouver leur rôle de valeurs de fond de portefeuille pour les particuliers désireux de faire grossir un capital sur le long terme, ou de se constituer une rente.

 

Des dividendes en pagaille

Selon une étude d’UBS relayée par le Financial Times, les rémunérations des actionnaires se sont envolées dans toute l’Europe. Espagne, Italie, et même Royaume-Uni, toutes les zones où l’activité de crédit se fait essentiellement à taux variable ont vu leurs banques engranger des bénéfices record.

Après un exercice 2022 déjà placé sous le signe de la croissance et de la reconstitution des réserves, 2023 a été encore plus favorable et a permis d’ouvrir les vannes de la rémunération, tant sous forme de dividendes (deux-tiers des reversements) que de rachats d’actions (un tiers).

Sur un an, les montants versés par les établissements auront bondi de +54 % – bien plus que la progression en vigueur sur le reste de la cote (+5 % sur le CAC 40).

En Espagne, Santander reversera 1,5 Md€ à ses actionnaires au titre de l’exercice 2023 ; BBVA 2,2 Mds€, et CaixaBank fera monter les enchères jusqu’à 2,9 Mds€. Chez cette dernière, les actionnaires récupèreront 8,2 % de la valorisation boursière de l’entreprise, et même plus de 10 % en prenant comme référence le cours au 1er janvier de cette année.

Les banques italiennes jouent la même partition, avec 8,6 Mds€ de rémunération du côté d’Unicredit, dont 65 % seront dépensés en rachats d’actions en 2024. Si le rendement brut de l’action reste, dans l’absolu, relativement modeste à 5,16 %, le groupe bancaire va reverser plus de 14,6 % de sa capitalisation boursière aux actionnaires – et même plus de 20 % en considérant sa capitalisation boursière du début d’année.

 

 

Les valeurs françaises en embuscade

Depuis un an, les analystes tricolores ont eu beau jeu de moquer la piètre performance des banques hexagonales par rapport à leurs concurrentes européennes. Il est vrai qu’elles n’ont pas pu se permettre les mêmes largesses, du fait d’un contexte bien différent. Stock de crédits immobiliers à taux fixe, poids du Livret A, et baisse des encours des comptes à vue sont venus ralentir la hausse de la rentabilité.

Reste que, contrairement aux établissements européens qui ont déjà mangé leur pain blanc, les banques françaises peuvent encore espérer une amélioration de leur situation dans les prochains mois. Mieux encore, tous les facteurs qui ont joué contre elles depuis deux ans et qui les ont empêchées de profiter immédiatement de la hausse du coût de l’argent vont jouer en leur faveur lorsque la BCE débutera son cycle de baisse des taux.

Alors que leurs voisines espagnoles, italiennes et anglaises verront la profitabilité de leurs portefeuilles de crédit s’éroder à mesure que les taux d’intérêt s’assagiront, les banques françaises profiteront toujours de l’effet bénéfique du temps avec le remboursement continu des anciens crédits.

L’encours de crédits à taux ultra-bas étant encore important (mais s’amenuisant jour après jour), les prêteurs français vont continuer de voir la rentabilité de leurs capitaux s’améliorer même en période de baisse des taux. Tant que les établissements tricolores produiront de nouveaux crédits dont la rentabilité est supérieure à celle de leur stock de prêts, les comptes s’amélioreront mois après mois.

De plus, les établissements tricolores ont été contraints à plus de prudence durant les deux derniers exercices. L’exemple d’Unicredit est flagrant. Certes, le groupe italien va reverser aux actionnaires l’équivalent d’un cinquième de sa valeur boursière en début d’année. Mais les 8,6 Mds€ rendus vont engloutir la quasi-totalité du bénéfice net engrangé durant l’exercice échu (9,5 Mds€). Cette politique de distribution ne laisse aucune marge de manœuvre, et revient à dire que la banque est à court d’idées pour investir et augmenter sa rentabilité future.

De leur côté, les banques françaises sont restées particulièrement prudentes sur la part des bénéfices redistribuée aux actionnaires. Le Crédit Agricole ne s’engage que sur une distribution de 50 % des bénéfices, BNP Paribas refuse la surenchère avec un plafond annoncé à 60 % jusqu’en 2026, tandis que la Société Générale reversera 1,25 € par action pour 2,17 € engrangés, soit 57 %.

Toutes choses égales par ailleurs, les banques françaises pourraient donc quasiment doubler les dividendes de leurs actionnaires avant d’atteindre les taux de distribution de leurs homologues européennes… et ce sans compter l’amélioration à prévoir de la rentabilité de leurs capitaux en 2024.

 

 

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