Euroapi avait tout pour réussir sur les marchés financiers : un statut de leader dans l’univers pharmaceutique, de nombreux clients, des dirigeants dithyrambiques sur le potentiel de la société, une introduction en Bourse réussie, et pourtant…
L’histoire n’avait rien à envier à un conte de fées.
Tout a commencé quand Sanofi, grand laboratoire pharmaceutique français, a décidé de « spin-offer », c’est-à-dire de céder l’une de ses participations pour la coter en Bourse.
La société concernée, en l’occurrence Euroapi, avait tout d’une pépite. Positionnée sur les principes actifs pharmaceutiques, elle jouissait d’une excellente réputation dans le secteur.
En mai 2022, l’opération fut un succès, avec une introduction à 12 € suivie d’une envolée du titre à l’automne 2022, avec un plus-haut à 19,01 €.
J’écumais alors les plateaux télé de Boursorama à BFM Business pour exprimer ma joie de voir enfin une opération financière – en l’occurrence une introduction sur le marché – couronnée de succès.
En août 2023, les dirigeants nageaient dans l’optimisme, délivrant des prévisions euphoriques. Il était question d’une croissance de 7 % chaque année sur la période 2023-2026, ajoutée à une nette amélioration de la rentabilité… La marge d’Ebitda était attendue à 12 % au titre de l’exercice 2023, avant de voguer vers les 20 % en 2026. De quoi laisser pantois le gérant le plus négatif sur la société…
Et puis patatras !
Euroapi : quand la mécanique se grippe
Le lundi 9 octobre 2023, le groupe revoyait à la baisse ses objectifs 2023, prévoyant désormais une croissance du chiffre d’affaires comprise entre +3 % et +5 %, contre +7 % à +8 % précédemment.
Même tendance pour la marge d’Ebitda, attendue entre 9 % et 11 %, là où la communauté financière était plutôt sur une fourchette entre 12,5 % et 13,5 %.
Exit également les prévisions financières sur 2023-2026…
Résultat : un carnage boursier, et une chute en une séance de l’ordre de 60 %, digne d’une valeur biotechnologique qui aurait échoué en phase II d’un test clinique.
On attendait donc avec impatience la date du 28 février, celle de la présentation des comptes annuels, ainsi que la nouvelle revue stratégique du groupe.
Et puis, nouveau pataquès, avec une progression de 3,8 % du chiffre d’affaires à 1 Md€, une marge d’Ebitda dans le bas de la fourchette annoncée en octobre – soit 9,2 % –, et surtout des dépréciations d’actifs de l’ordre de 226,4 M€, suite à l’arrêt de la production de 13 principes actifs pharmaceutiques (API) à faible marge…
La perte nette sur 2023 s’est ainsi établie à 189,7 M€, ce qui n’était pas prévu au programme.
Pour ne rien arranger, les perspectives 2024 sont cauchemardesques, avec une baisse du chiffre d’affaires attendue entre 4 % et 7 %, et une marge d’Ebitda entre 6 % et 9 %, ce qui indique une nouvelle détérioration par rapport à 2023.
Changement de directeur général, cession d’usines, arrêt donc des molécules non rentables… Le bilan est plus qu’alarmant, ce que n’ont pas apprécié les investisseurs, comme le montre la baisse de plus de 50 % du titre en une seule séance, aboutissant à un cours boursier autour de 3,40 €.
Cours de l’action Euroapi ces 6 derniers mois. Source : Investing.com
La capitalisation boursière est ainsi revenue sur des niveaux de 320 M€, digne d’une grosse small cap.
Et personne ne semble se positionner sur le dossier, à l’image de la Deutsche Bank qui vient de dégrader son avis sur la valeur, passant d’un objectif de cours de 6 € à 3 €…
Prudence donc : il ne faut jamais ramasser un couteau qui tombe. La reprise boursière n’est pas encore au rendez vous.