Si les marchés financiers se sont remis du choc des droits de douane imposés par l’administration Trump, les investisseurs ne sont pas sortis d’affaire pour autant. Une menace encore plus grande se profile à l’horizon : la Section 899. Cette disposition fiscale, discrètement avancée par Washington, pourrait largement amputer leurs revenus…
Au mois d’avril, les valorisations boursières se sont effondrées lorsque Donald Trump a dévoilé ses droits de douane à l’importation. Cet épisode de politique spectacle a obligé les investisseurs à prendre en compte le risque législatif que fait peser la nouvelle administration sur les marchés.
La baisse était alors parfaitement justifiée : non seulement les « droits réciproques » tels que présentés atteignaient un niveau si élevé qu’ils menaçaient de faire plonger l’économie américaine en récession, mais cette entorse à l’habituel libéralisme américain laissait présager de futures mesures nuisant aux affaires.
Si les marchés sont progressivement revenus à leur niveau du mois de mars à la faveur de l’assouplissement des règles, Washington prépare en catimini une nouvelle disposition qui risque de faire l’effet d’une bombe atomique sur les marchés.
La Section 899 de la « Big Beautiful Bill », qui a été votée en l’état par la Chambre des représentants, prévoit une majoration des prélèvements fiscaux imposés aux investisseurs étrangers de 20 points de pourcentage, avec une possibilité de faire monter cette imposition jusqu’à 50 % des revenus distribués.
Cette taxe confiscatoire sur les capitaux sortants bouleverserait la rentabilité de toutes les valeurs américaines cotées. Actions, dette d’entreprise et obligations d’Etat verraient leur rentabilité amputée du jour au lendemain au profit de l’Oncle Sam pour les opérateurs étrangers.
Si la Section 899 passe l’étape du vote par le Sénat sans modification, nous risquons un krach majeur sur les grands indices boursiers lorsque la finance internationale réévaluera le retour sur investissement des valeurs américaines. Alors que les marchés étatsuniens sont revenus sur leurs plus-hauts (exprimés en dollars), une prudence maximale est de mise.
La situation est d’autant plus inquiétante que l’administration fait preuve d’une rare discrétion au sujet de la Section 899. Contrairement aux droits de douane à l’importation, ces droits sur la sortie de capitaux ne sont absolument pas mis en avant dans la sphère médiatique.
Preuve qu’ils sont amenés, eux, à rester ?
Section 899 : big caps, small caps, obligataire, ETF : tous les actifs concernés
L’objectif de la Section 899 est de limiter la fuite des capitaux vers l’étranger.
A l’instar des économies administrées à la manière de l’URSS, Washington espère ériger une muraille entre son marché intérieur et le reste du monde. La nouvelle administration tourne le dos à un demi-siècle de laisser-faire au sein de la zone dollar, durant lequel les Etats-Unis encourageaient les pays étrangers à investir et échanger le billet vert sans entraves, renforçant ainsi leur dépendance.
La doctrine actuelle est désormais de découpler les Etats-Unis de l’ensemble de la planète. Après la limitation des flux entrants (droits de douane punitifs), Washington espère assécher les flux sortants avec une taxation forfaitaire sur toutes les rémunérations versées aux investisseurs provenant de pays s’adonnant à des « pratiques fiscales injustes envers les Etats-Unis ».
Cette formulation large permet une application totalement arbitraire, et il ne fait nul doute que l’Europe fera partie du lot, à l’instar de la Chine, du Canada, et de toutes les puissances économiques de taille significative.
La taxation des dividendes détachés par les entreprises américaines augmenterait, pour un contribuable tricolore, de 133 %. Elle passerait de 15 % du montant détaché à 35 %. Sur le détachement d’intérêts, aujourd’hui épargné par la taxation à la source, le prélèvement passerait de 0 % à 20 %.
La nouvelle taxe touchera également les foncières cotées (REIT), les acteurs du financement non-bancaire (BDC) ; les fonds cotés (ETF), et même les obligations américaines (T-bonds).
Aucun investisseur ne sera épargné
Preuve que la Section 899 n’est pas une arme de politique internationale mais un dispositif conçu pour faire cesser la fuite des capitaux à l’échelle du pays, il est prévu que ses dispositions s’appliquent à quasiment tous les acteurs économiques amenés à investir aux Etats-Unis.
Seront concernés les gouvernements, les entreprises dont le siège social n’est pas basé aux Etats-Unis, les fondations à but non lucratif, les entreprises non cotées dont plus de la moitié du capital est détenu par des étrangers, et les résidents fiscaux des pays visés… autant dire toutes les personnes morales et physiques pouvant acheter des actifs outre-Atlantique.
Vers une liquidation massive des valeurs américaines ?
Lorsque le marché fonctionne correctement, les investisseurs réagissent en rendement net de fiscalité. Aussi, toutes choses égales par ailleurs, une entreprise qui sert un rendement de 7 % voit son cours évoluer au même niveau qu’une concurrente qui offre 10 % dans un pays où les dividendes sont taxés à 30 % (la distribution finale étant la même pour les actionnaires).
Aujourd’hui, les actions américaines sont valorisées sur la base d’un rendement net de prélèvement de 1,09 % par an. Pour atteindre ce même niveau de rémunération après la mise en place de la Section 899, il faudra que le S&P 500 s’effondre de -24 %.
Il en sera de même pour les foncières cotées et les ETF – notez que même les fonds censés être diversifiés sur des indices mondiaux font la part belle aux actions américaines, et ne seront donc pas immunisés.
Le salut viendra peut-être paradoxalement du marché de la dette américaine. A l’écriture de ces lignes, les prêteurs internationaux exigent un rendement de 4,5 % pour prêter à 10 ans à l’Oncle Sam.
Pour obtenir une rémunération équivalente selon les dispositions de la Section 899, le rendement du 10 ans américain devrait s’ajuster à 5,65 %. Un véritable krach obligataire qui pousserait les Etats-Unis vers le défaut de paiement.
Jusqu’ici, le marché de la dette d’Etat a été le garde-fou ultime aux mesures autodestructrices de la nouvelle administration. Depuis le printemps, ce n’est que quand le rendement du T-bond s’envole que Washington fait marche arrière.
Pour les investisseurs du monde entier, il n’y a plus qu’à espérer que la perspective d’une envolée du coût de la dette incite le Sénat à adapter la Section 899. A défaut de quoi, l’été sera brûlant sur les marchés financiers.
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Aviez-vous entendu parler de la Section 899 ? Que pensez-vous de ce nouveau dispositif ? N’hésitez pas à nous faire part de votre opinion dans les commentaires !
Bonjour, non je n’avais aucune connaissance de ce projet et de cette section .
Mais c’est de la dictature, les plus gros voraces ce sont eux, ils aiment s’asseoir à ta table pour se gaver et dénouent facilement leurs engagements. Si tous les investisseurs du monde tradent aux us , c’est qu’ils ont tout fait pour, « TRUMPY », il va bien lui, c’est sur que sa fortune est toute propre ? On trouve plus facilement des marques Américaines pour des FRITES !! ils pleurent car ils ont trop de produits » étrangers » et dans le même temps se tapent sur le bide avec les profits qu’ils y font, ou peut-être devraient ils revoir la notion de commerce et d’accords.
C’est de l’abus, en force, et en douce, espérons qu’ ils trouveront de la résistance face à ce gouvernement d’hommes d’affaires car ça va sentir pas bon du tout…