Fin janvier Renault a annoncé renoncer à l’IPO d’Ampère, sa filiale de véhicules électriques. Les conditions de marchés ne sont pas au rendez-vous. Le climat actuel n’est favorable ni aux IPO, ni au secteur de l’automobile – qui plus est sur le segment de l’électrique. Tesla l’a montré, lors de ses résultats, les chiffres se dégradent. Et cela devrait continuer…
Lundi 29 janvier, alors que je n’étais pas loin de la fin de mon intervention sur BFM Business, je me suis fait interpeller, en plein direct donc, par Guillaume Sommerer, le présentateur de l’émission : « Eric, votre réaction à chaud sur l’annulation que nous venons d’apprendre de l’introduction en Bourse d’Ampère, l’entité de Renault spécialisée sur les véhicules électriques… »
Surpris, je peux vous dire que je l’ai été.
Il faut dire que le patron de Renault, Luca de Meo, avait beaucoup misé sur cette opération annoncée depuis déjà 15 mois ! A l’époque, il estimait même que « spin-offer » une telle entité encourageait la création de valeur pour la société.
L’annonce est bel et bien étonnante. Mais, curieusement, les investisseurs n’en ont pas tenu rigueur à l’homme fort du constructeur, l’action a même regagné plus de 5 % depuis le 29 janvier.
Alors ? Que faut-il en penser ?
IPO : un marché en berne
Pour bien comprendre ce volte-face, il faut analyser en détail le marché des introductions en Bourse. Il n’a clairement plus rien à voir avec ce qu’il était il y a plus d’un an.
En effet, 2023 a été une année effroyable pour les banquiers d’affaires. Et force est de constater que ce début d’année 2024 n’inverse pas la tendance.
Il n’y a donc pas besoin d’être un génie de la finance pour anticiper que la valorisation initialement attendue par les investisseur (10 Mds€) – et la vente de 15 % pour 1,5 Md€ – était bien partie pour être fortement revue… à la baisse.
Car, oui, le climat actuel rend les IPO compliquées. Et, en plus, il n’est pas non plus favorable au secteur de l’automobile, notamment sur le segment de l’électrique. En effet, les constructeurs automobiles sont engagés dans un vaste mouvement de déflation… (Ou, si vous préférez, de sévère baisse des prix.)
Les prix se dégradent sur l’électrique
On l’a vu avec Tesla, lors de la présentation de ses résultats annuels. Baisse des prix oblige, la marge opérationnelle de Tesla s’est sérieusement dégradée, passant en un an de 16 % à 8,2 %. Et cela devrait continuer…
Ainsi, pour concurrencer les Chinois, le constructeur a pris la décision de lancer des véhicules low-cost, avec notamment des modèles à quelque 25 000 $.
Même tendance chez Volkswagen. Le célèbre constructeur allemand, numéro deux en Europe juste derrière Tesla, a décidé de baisser le prix de ses véhicules entre 6 000 € et 11 000 € selon les modèles…
Même Renault a évoqué une baisse de 15 % pour sa Scenic E-Tech 100% électrique.
Comme en plus, les subventions à l’achat fondent dans tous les pays européens, avec notamment la décision prise par Berlin – du jour au lendemain – de les sabrer pour tenir son budget, on se retrouve avec un marché des plus compliqués.
Ce que confirment les parcours boursiers difficiles de l’ensemble des protagonistes du secteur. C’est ainsi par exemple que Tesla perd plus de 25 % depuis le début de l’année, imitée d’ailleurs par de grands noms comme Nikola et Rivian, en baisse de plus de 20 %.
Que dire également des performances des groupes chinois avec des reculs compris entre 10 % et 30 % pour les géants locaux BYD et NIO ?
Carlos Tavares, un visionnaire ?
La voiture électrique n’est pas morte mais, en Bourse, elle ne séduit plus.
Et si Carlos Tavares, le patron de Stellantis, n’avait pas tort en expliquant que l’électrique est beaucoup moins profitable et que finalement il allait continuer à engranger des profits avec les voitures à essence ?