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Legrand : quand les data centers prennent le relais du bâtiment

By 24 mars 2025No Comments

Avec un secteur du bâtiment en berne, Legrand aurait pu sombrer. Mais l’équipementier électrique a su rebondir en misant sur la montée en puissance des data centers et l’explosion de l’IA. Résultat : une activité qui tient bon et des perspectives qui font vibrer les investisseurs.

Petit à petit, le gel des transactions immobilières voit ses effets descendre dans la chaîne de valeur. Le coup d’arrêt des réservations d’immeubles de bureaux et d’habitation se manifeste dans l’activité des géants du bâtiment avec l’assèchement des carnets de commandes. Par voie de conséquence, les fournisseurs d’équipements subissent à leur tour une baisse de la demande : c’est vrai pour les producteurs de béton, de cuivre, mais aussi pour les équipementiers comme Legrand.

Le spécialiste du matériel électrique pouvait donc craindre un effondrement de son activité en 2024, et un exercice 2025 calamiteux. Mais grâce à sa diversification, il a fait preuve d’une remarquable résilience.

Mieux encore, son chiffre d’affaires a réussi à progresser légèrement de 2,8 % l’an passé, pour atteindre la somme de 8,65 Mds€. Une hausse quasi-nulle une fois corrigée de l’inflation, mais qui a le mérite de représenter un atterrissage en douceur au vu du contexte morose du secteur du bâtiment.

Alors que les Bourses ont procédé à des ajustements – sans pitié – des valorisations ces dernières semaines, le titre s’offre le luxe de rester en progression de près de 10 % depuis le 1er janvier. L’optimisme des investisseurs se justifie par la volonté du groupe de se renforcer en Amérique du Nord pour profiter de la multiplication exponentielle des centres de données. Avec le plan colossal d’investissement dans l’IA voulu par Donald Trump, l’électricien français vise un renforcement de son activité sur place pour accompagner la hausse de ce compartiment dont l’activité se situe déjà à 80 % aux Etats-Unis.

 

Legrand data centers 

Avec les centres de données, Legrand compense plus que largement l’érosion des ventes dans le bâtiment résidentiel (photo : Legrand)

 

Une année rassurante pour les actionnaires 

L’exercice 2024 a été placé sous le signe du grand ménage pour les comptes de Legrand. D’une part, l’équipementier a fini de solder le coût de sa sortie du marché russe. D’autre part, il a réussi à maintenir sa marge opérationnelle au-delà des 20,5 % malgré l’assèchement de ses métiers historiques dans le bâtiment. Dans le résidentiel, l’activité a été en nette baisse en Europe, se contractant de -2,3 % à taux de change constants. En organique, les ventes en Europe de l’ouest se sont contractées de -3,1 % sur 1 an, tandis que l’Europe de l’est voyait son activité croître de 3,4 %, dans des volumes toutefois insuffisants pour équilibrer le manque à gagner sur les marchés historiques.

Les analystes ont bien conscience que l’activité de Legrand dans le bâtiment ne pourra redémarrer que plusieurs mois après le rebond des prises de commandes chez les constructeurs. Celui-ci se faisant encore attendre, l’optimisme n’est pas encore de mise sur ce compartiment.

Si les marchés ont continué de plébisciter le dossier, c’est parce que Legrand n’est plus un simple distributeur européen de matériel électrique pour le bâtiment résidentiel. Il est désormais bien diversifié, tant géographiquement qu’au niveau de sa clientèle.

De fait, l’Amérique du nord (et centrale) représente aujourd’hui plus de 40,1 % du chiffre d’affaires du groupe – soit autant que l’Europe (40 %). Outre-Atlantique, les ventes sont en hausse de 4,5 % sur 1 an à taux de change constants, et ont bondi de 11,6 % sur le dernier trimestre 2024. En regardant en détail les comptes, cette performance tient essentiellement au succès des produits destinés aux centres de données aux Etats-Unis, les ventes étant globalement en recul au Canada et au Mexique.

Les data centers, nouvel Eldorado de Legrand

L’an passé, la fourniture d’équipements aux data centers a apporté une contribution de 1,6 Md€ au chiffre d’affaires de l’entreprise. Ce volume d’affaires a plus que doublé (+157 % en données pro-forma) depuis 2019, et représente pas moins de 20 % du chiffre d’affaires du groupe en année pleine.

L’augmentation des ventes atteint 13 % par an en organique, et 19 % en comptant les opérations de croissance externe. Legrand intervient sur de nombreuses problématiques de ces sites qui regroupent des quantités inédites de matériel informatique : protection électrique de l’installation, distribution du courant, gestion des racks et de leur refroidissement, optimisation de la consommation et interopérabilité des systèmes pour rendre les bâtiments intelligents.

Il est désormais acquis que la souveraineté dans l’IA sera, dans les prochaines années, un enjeu majeur pour les grands blocs économiques comme le sont l’indépendance énergétique et la fabrication de microprocesseurs. Les investissements prévus, tant en Europe qu’aux Etats-Unis, se chiffrent déjà en centaines de milliards de dollars, et Legrand prévoit d’accompagner la demande en équipements grâce à son offre actuelle et en procédant à des opérations de croissance externe.

Déjà près de 50 % de la demande en équipement provenant des Etats-Unis est fabriquée sur place, mettant cette partie de la production à l’abri des barrières douanières sans cesse relevées par Washington. Pour le reste, Legrand est suffisamment confiant dans sa capacité à imposer ses prix pour prévoir de répondre à la demande locale en important des produits fabriqués dans ses usines de Chine et du Mexique, et en répercutant les éventuels droits de douane sur les clients plutôt que de rogner sur ses marges.

Entre la croissance organique de l’activité et les acquisitions, Legrand vise une forte reprise de son activité cette année. Le chiffre d’affaires global devrait augmenter de 6 % à 10 % en 2025, justifiant ainsi la capitalisation de plus de 27 Mds€ qui valorise le titre près de 24 fois ses bénéfices annuels. Un ratio plus élevé que la médiane des entreprises du CAC 40 (18,9), qui se justifie par les importants relais de croissance et la possibilité de voir le bénéfice s’envoler en cas de reprise du secteur du bâtiment en Europe l’an prochain.

Etienne Henri

Etienne Henri est titulaire d'un diplôme d'Ingénieur des Mines. Il débute sa carrière dans la recherche et développement pour l'industrie pétrolière, puis l'électronique grand public. Aujourd'hui dirigeant d'entreprise dans le secteur high-tech, il analyse de l'intérieur les opportunités d'investissement offertes par les entreprises innovantes et les grandes tendances du marché des nouvelles technologies.

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