Sell-off… Krach… Bear market… Si les qualificatifs ne manquent pour définir le contexte boursier actuel, le constat est le même : les marchés baignent dans le rouge. Un problème pour certains, une opportunité pour d’autres. La saison des soldes est ouverte ! Bon nombre de dirigeants y voient d’ailleurs une occasion inespérée de racheter leur entreprise à vils prix. L’idée ? Tirer parti – profit ! – de la situation. Pourquoi ? Comment ? Explications.
Alors que le monde devient de plus en plus complexe… que la Bourse devient de plus en plus volatile, et donc plus difficile à appréhender… que les IPO se raréfient… de plus en plus de « managements », actionnaires de leur structure, décident de profiter de la faiblesse des cours actuels pour sortir leur boîte de la cote.
En effet, la saison des soldes actuelle ne sert pas que les investisseurs, certains dirigeants y voient également une occasion inespérée de racheter leur entreprise. « C’est le monde à l’envers ! », me direz-vous. Normalement, coter son entreprise est le point culminant d’une aventure entrepreneuriale. Eh bien pas tout le temps…
Pourquoi retirer son entreprise de la cote ?
Parfois, le management estime que la Bourse lui apporte plus d’ennuis que de bénéfices. Il faut reconnaître que le cours de Bourse fait peser une pression importante sur une entreprise en phase de décollage.
A discuter avec eux, beaucoup d’entrepreneurs reprochent aux marchés financiers de valoriser leur société uniquement sur la projection de résultats des derniers et prochains trimestres, sans chercher à comprendre la construction de valeur à long terme.
Et puis, parfois, l’entreprise estime qu’elle sera plus à même de lever des fonds en quittant la Bourse ou tout simplement qu’elle n’a plus besoin des liquidités que lui offrent les marchés financiers.
L’objectif initial de la levée de liquidités ayant été atteint, ils sont tentés de sortir leur entreprise pour mieux la contrôler. Eux aussi cherchent à acheter au son du canon, selon le principe cher à Mister Buffett.
En général, les dirigeants sont aidés par des fonds de private equity avides de deals. L’avantage pour l’entreprise est que ces derniers investissent avec des horizons de six à huit ans qui correspondent souvent mieux aux besoins des dirigeants.
La tendance est encore plus forte en Europe. Les taux restent en effet plus faibles. Et le prix des entreprises, qui était déjà assez bas, a, par conséquent, encore faiblit avec le sell-off actuel. Couplez cela à des entreprises qui sont bien plus internationales en 2022 qu’en 2000 ou en 2008, et vous obtiendrez la tendance actuelle avec beaucoup de grands patrons qui veulent profiter de cette période de déprime. (Ce n’est pas Xavier Niel qui vous dira le contraire, lui qui veut sortir le groupe Illiad !)
Cela dit, en tant qu’investisseur, vous aussi, vous pouvez tirer parti de cette nouvelle tendance. L’entreprise que je rentre ce mois-ci au portefeuille de NewTech Insider vaut au moins deux fois plus cher que ce qu’affiche sa valorisation actuelle… De là à dire qu’elle pourrait être la cible d’une OPA, il n’y a qu’un pas… (Même si je ne le souhaite pas.)
Bref, les exemples sont nombreux. Tous les secteurs sont concernés. Je m’attarderai donc sur les deux que je connais le mieux, le gaming et le Saas.
Jeux vidéo : OPA, OPR… un terrain propice
aux « Valeurs de Sortie »
OPA… OPR… Sorties de cote… Le secteur du jeu vidéo, qui est en phase de consolidation, n’échappe pas à la règle. Après plusieurs OPA historiques, notamment les deux offensives de Microsoft, sur Bethesda (8,1 Mds$) et sur Activision-Blizzard (68,7 Mds$), il est clair que les opérations de ce type se multiplient. Et nombreux sont les dirigeants qui cherchent à sortir leurs entreprises de la cote.
En Europe, par exemple, c’est le géant nordique Embracer qui s’est allié au management d’Asmodée pour reprendre la perle française de l’édition de jeux de société et lier l’univers du jeu de plateau et celui du jeu vidéo.
En France, les rumeurs sont nombreuses autour d’Ubisoft : des discussions auraient lieu entre la famille Guillemot, actionnaire principal d’Ubisoft, et des acteurs financiers dont le géant KKR.
A l’international, nous avons Razer, entreprise américano-singapourienne qui emploie plus de 1 500 personnes et s’est spécialisée dans le hardware pour PC gamer. Son P-DG et fondateur, Min-Liang Tan, qui détient déjà 57 % des titres s’est allié avec le méga-fonds CVC Capital Partners pour sortir son entreprise de la Bourse. Pour ce faire, il faudra débourser 1,38 Md$, soit une prime de +5,6 % par rapport au cours précédent.
Dans le secteur des équipements et périphériques liés aux jeux vidéo, des noms comme Turtle Beach ou Corsair cherchent à se vendre.
Après le jeu vidéo, le secteur du software as a service ?
La tendance devient de plus en plus violente chez certaines stars du software-as-a-service (SaaS). La principale raison est évidente : le modèle du SaaS, avec ses revenus récurrents est l’archétype de la vache à lait facile.
Mais, une sous-valorisation manifeste, alors que le management voit très bien que l’effort pour devenir rentable porte ses fruits, peut encourager les dirigeants de ce genre d’entreprise à… racheter eux-mêmes leur entreprise, justement. Et ce d’autant que de plus en plus d’acteurs du private equity, capables de comprendre le modèle SaaS sur le long terme, cherchent à se renforcer sur le secteur, comme en témoignent les récentes opérations sur Cast ou Generix en France.
Dans le fond, je pense que c’est plutôt une bonne nouvelle pour ces entreprises. En effet, le private equity est beaucoup plus dans l’accompagnement des managers. Les fonds viennent souvent avec l’idée de travailler sur les coûts. Or, ces boîtes débordent souvent de coûts superflus.
En revanche, pour l’investisseur, c’est une autre histoire… Si cela continue, nous n’aurons plus rien à nous mettre sous la dent pour investir ! Mais elle peut tout aussi bien être couronnée de succès quand on sait comment s’y prendre !