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HighTechIntelligence artificielle

Le bon pari de Capgemini dans l’IA

By 15 juillet 2025No Comments

Capgemini se lance à la conquête de l’IA spécialisée ! Alors que les géants de l’intelligence artificielle investissent des sommes colossales dans des modèles toujours plus grands, Capgemini choisit une approche différente en acquérant WNS. Ce mouvement stratégique pourrait offrir au groupe une place de choix dans le domaine émergent de l’IA agentique…

 

Alors que le secteur des sociétés de services informatiques touche aux limites de son modèle d’affaires, les groupes français redoutent tous de suivre le destin boursier d’Atos. Un temps érigé en modèle pour sa capacité à grossir à marche forcée grâce à d’incessantes opérations de croissance externe, le groupe s’est retrouvé pris en tenaille entre une hausse structurelle de ses coûts et une dette colossale atteignant les 5 Mds€. Son explosion en vol et sa restructuration ont laissé aux investisseurs de douloureuses cicatrices, avec une baisse de 99 % de sa capitalisation boursière en cinq ans.

Les marchés sont désormais vaccinés, et regardent d’un mauvais œil les achats dont l’unique but est de regrouper des activités identiques sous une même enseigne au prix d’une hausse croissante de l’endettement. Alors qu’il est désormais établi que les synergies sont dures à dégager après les opérations de croissance externe, chaque mouvement capitalistique est scruté avec la plus grande attention.

C’est dans ce contexte délicat que Capgemini a décidé de sortir le chéquier pour procéder à une acquisition d’un montant historique. Il va mettre sur la table pas moins de 3 Mds$ pour racheter un spécialiste américain de l’intelligence artificielle et de l’automatisation : WNS.

 

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Les actionnaires de WNS pourront se frotter les mains, avec un gain de 58 % depuis le 1er janvier. Infographie : TradingView

 

L’IA est, sans conteste, un secteur en pleine bulle. Le fait que tous les acteurs industriels se sentent obligés d’afficher leur exposition à ce marché est inquiétant tant il rappelle la frénésie autour d’Internet à la fin des années 1990, et à la Blockchain plus récemment.

Mais, en l’occurrence, le pari de Capgemini pourrait être le bon. Face aux géants de l’IA comme OpenAI, Meta et Anthropic, le Français ne saurait s’attaquer frontalement à la création de modèles larges, les LLM, qui nécessitent des investissements se mesurant en dizaines, voire en centaines de milliards de dollars.

En revanche, avec le rachat de WNS, il peut s’exposer au secteur naissant de l’IA agentique. Pour beaucoup d’experts, il s’agit de la suite logique de l’évolution des IA génératives qui va succéder aux modèles toujours plus gros, et toujours plus chers, dont la performance n’augmente plus aussi vite qu’auparavant.

Plutôt que de chercher à lever des sommes à onze ou douze chiffres, avec le risque de les dépenser sans aucun résultat tangible, le Français pourra intégrer à son catalogue des services dont les coûts d’investissement initiaux sont bien plus faibles. Cette stratégie est bien plus cohérente que celle de certains décideurs européens, qui voudraient créer ex-nihilo des équivalents aux LLM américains sur le Vieux Continent.

 

Avec l’IA agentique, Capgemini veut faire mieux avec moins

L’engouement de ces dernières années pour des modèles d’IA toujours plus gros est partie d’un constat bien réel : au début des années 2020, les modèles de langage voyaient leurs performances et leurs capacités s’améliorer à mesure que leur taille augmentait.

Fort logiquement, les créateurs d’IA se sont lancés dans une course au gigantisme. Capacité de réflexion, de travail multi-langue, d’écriture de code informatique : dans un premier temps, le pari s’est avéré gagnant et les IA ont vu leurs capacités décuplées.

Mais, depuis l’été 2024, le secteur traverse une crise passée sous silence dans la sphère économique. Les modèles expérimentaux, dont la taille est parfois dix fois supérieure aux modèles commercialisés, ne voient pas leur performance augmenter significativement. Pire, ils régresseraient même dans certains domaines.

Les informaticiens sont alors revenus à leurs premières amours : l’algorithmie. Plutôt que de laisser aux IA toujours plus généralistes le soin de comprendre par elles-même les problèmes et d’y apporter une réponse, ils prennent désormais le parti de découper les problèmes en concepts plus simple. L’avantage est de pouvoir utiliser ensuite des petites IA spécialistes, dont le coût d’élaboration (et d’utilisation) est infiniment plus faible.

L’IA dite « agentique », car elle se base sur des agents spécialisés, ouvre un nouveau terrain de jeu aux informaticiens. Non seulement elle permet de contourner la stagnation des performances des grands modèles, mais elle redonne aux acteurs secondaires la possibilité de proposer des services compétitifs sans être capitalisés à hauteur de centaines de milliards de dollars.

C’est exactement le pari que fait Capgemini avec l’acquisition de WNS.

 

Un acteur déjà implanté

Avec 65 000 employés, le groupe WNS n’est pas une start-up vaporeuse. Il possède déjà des implantations en Inde, aux Philippines et en Afrique du Sud.

Il propose des outils d’analyse de données et de prévision pour l’assurance, la logistique, et la banque. Son activité dégage pour 1,3 Md$ de chiffre d’affaires en année pleine, et il affiche une croissance de l’ordre de 10 % par an.

L’enjeu est de taille pour Capgemini qui prévoit, de son côté, une activité en stagnation cette année à périmètre constant. Signe que la Direction ne croit pas à la croissance organique, la variation du chiffre d’affaires sur 2025 était estimée entre -2 % et +2 % avant le rachat.

En proposant 76,5 $ par action WNS, Capgemini frappe fort en offrant une prime de 28 % par rapport au cours de Bourse moyen des trois derniers mois de sa cible. Les actionnaires se rassureront en se souvenant que la dernière méga-acquisition, le rachat d’Altran pour 3,6 Mds$ en 2020, avait permis au chiffre d’affaires de bondir de 14 Mds€ à 18 Mds€ entre 2019 et 2021.

Une fois l’activité de WNS intégrée dans les comptes, le volume d’affaires de Capgemini devrait dépasser les 23 Mds€ en année pleine, et la génération de cash-flow libre devrait passer au-dessus des 2 Mds€. Avec une capitalisation boursière passée sous les 25 Mds€, le groupe va commencer à attirer l’attention des investisseurs value.

 

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Ayant cédé plus de 20 % depuis son plus-haut annuel, le titre Capgemini va commencer à intéresser les investisseurs « value ».

Infographie : TradingView

 

Les actionnaires patients pourront, même en l’absence de perspectives de croissance organique, entrer progressivement en position pour jouer un retour à des jours meilleurs du secteur des entreprises de services numériques.

Les plus optimistes verront même dans le dossier Capgemini une opportunité de profiter de la croissance du secteur naissant de l’IA agentique.

Etienne Henri

Etienne Henri est titulaire d'un diplôme d'Ingénieur des Mines. Il débute sa carrière dans la recherche et développement pour l'industrie pétrolière, puis l'électronique grand public. Aujourd'hui dirigeant d'entreprise dans le secteur high-tech, il analyse de l'intérieur les opportunités d'investissement offertes par les entreprises innovantes et les grandes tendances du marché des nouvelles technologies.

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