Alors que nous nous étions habitués, ces dernières années, à voir les industries lourdes se concentrer auprès d’acteurs américains ou asiatiques, Air Liquide a pu concevoir – et financer – un projet industriel d’ampleur rarement égalée sur la scène internationale. Si le déploiement se passe sans encombre, les actionnaires d’Air Liquide pourront compter sur l’essor de l’hydrogène-énergie pour augmenter significativement le volume d’affaires du groupe.
Le gazier Air Liquide est plus connu pour la stabilité de son activité que pour ses coups de poker stratégiques. Pourtant, le vénérable groupe a annoncé son intention d’investir un montant record dans une nouvelle unité gazière à Baytown, au Texas.
En mettant jusqu’à 850 M$ sur la table, le Français veut construire quatre unités de séparation des gaz de l’air pour servir le marché nord-américain.
Le projet engloutira plus du quart du résultat annuel 2023, et aura un effet non négligeable sur les comptes. En contrepartie, Air Liquide deviendra un fournisseur incontournable pour ExxonMobil qui prépare, à proximité, un immense site de production d’hydrogène.
Air Liquide confirme que son offre de gaz industriels est toujours aussi pertinente dans un contexte de migration vers les énergies vertes. Le gigantisme du projet prouve que la transition énergétique des anciens pétroliers représente un relais de croissance significatif, et peut même créer de nouvelles sources de revenus grâce à la valorisation des sous-produits d’exploitation.
De quoi mettre du baume au cœur des actionnaires qui voient le titre s’essouffler depuis le printemps.
Si le titre Air Liquide marque le pas depuis ses plus-hauts historiques, le groupe dispose de nouvelles opportunités avec la transition énergétique. Infographie : Investing.com
L’hydrogène propre a besoin d’Air Liquide
La mission principale du site de Baytown sera on ne peut plus classique en termes de chimie, puisque les quatre unités sont conçues pour produire principalement de l’oxygène et de l’azote, les deux composants principaux de l’air que nous respirons. Ces gaz seront isolés de l’air ambiant et compressés avant d’être fournis à ExxonMobil.
Les volumes, en revanche, sont remarquables : en rythme de croisière, les unités produiront jusqu’à 9 000 tonnes d’oxygène et 6 500 tonnes d’azote par jour.
C’est une fois fournis à l’énergéticien que ces gaz banals auront une utilisation industrielle innovante. ExxonMobil est en effet en train de préparer, en collaboration avec Technip Energies, un méga-site dédié à la production et au transport d’hydrogène.
L’énergéticien utilisera du gaz naturel, abondant aux Etats-Unis, pour produire de l’hydrogène par reformage autothermique (ATR). L’hydrogène contenu dans le gaz sera extrait, et le CO2 émis dans le procédé, très concentré, sera capté et séquestré à moindre coût.
Schéma d’un réacteur de reformage autothermique. Infographie : Air Liquide
L’avantage de l’ATR est que la réaction de reformage du gaz naturel est simple et auto-entretenue. La haute température nécessaire au procédé est maintenue grâce à la chaleur de la combustion du gaz naturel. Il est facile de capter 99 % du CO2 produit dans le réacteur, et le procédé est si simple qu’il peut être décliné à échelle industrielle – d’où la taille colossale du site de Baytown.
C’est cette étape de conversion du gaz naturel en hydrogène dit « bleu » qui utilisera l’oxygène produit par Air Liquide.
Le projet aurait pu s’arrêter là, mais ExxonMobil a décidé d’aller plus loin pour anticiper l’essor de l’hydrogène-énergie dans notre mix énergétique. C’est là qu’intervient l’azote fourni par Air Liquide.
L’hydrogène-énergie en ligne de mire
Le reformage autothermique permet d’obtenir de l’hydrogène gazeux issu du gaz naturel qui a tous les avantages de l’hydrogène vert… mais aussi tous ses inconvénients.
Son stockage et son transport, notamment, restent un casse-tête du fait de sa légèreté et de sa grande volatilité. De nombreux détracteurs de l’hydrogène-énergie soulignent d’ailleurs à raison que l’hydrogène fait un bien piètre vecteur d’énergie s’il doit être conservé à -253 % ou dans des cuves sous pression qui sont de véritables bombes à retardement.
ExxonMobil en a conscience, et va convertir une partie de l’hydrogène en ammoniac. Plus grosse, la molécule d’ammoniac est aussi plus stable.
Sa densité à 20°C est près de neuf fois supérieure à celle de l’hydrogène. Il est possible de réaliser des réservoirs pressurisés à seulement 9 bars, contre 700 bars pour l’hydrogène. Même sa densité énergétique est plus intéressante, dépassant les 11,4 MJ/l contre 4,7 MJ/l pour l’hydrogène. La seule contrainte supplémentaire dans la chaîne de production est qu’il faut disposer d’une source d’azote pur… qu’Air Liquide se fait un plaisir de fournir.
Pour de nombreux spécialistes du secteur, l’avenir de l’hydrogène-énergie passe donc incontestablement par l’ammoniac. En entamant la production d’ammoniac « bleu » à échelle industrielle, ExxonMobil et Air Liquide fourbissent leurs armes pour être en mesure de répondre à la future demande en carburant propre. Et même si l’hydrogène utilisé sur le projet proviendra du gaz naturel, les procédés mis en place pourront être utilisés à l’identique lorsqu’il sera plus rentable d’utiliser de l’hydrogène vert issu d’électrolyseurs.
Des externalités positives pour Air Liquide
L’investissement massif consenti par Air Liquide dans les unités de séparation des gaz de l’air n’aura pas pour unique débouché la vente d’oxygène et d’azote. Pour produire les milliers de tonnes quotidiennes de ces deux gaz, il faudra traiter une quantité encore plus grande d’air atmosphérique.
Ces volumes hors-norme pour l’industrie gazière permettront de récupérer les gaz rares présents en quantités microscopiques dans l’atmosphère comme l’argon, le krypton ou le xénon. Les installations étant financées par la vente d’azote et d’oxygène, il s’agira pour Air Liquide de simple sous-produits industriels dont le coût marginal de production sera anecdotique.
Le gazier tricolore pourra vendre ces gaz rares aux industriels nord-américains avec un avantage concurrentiel conséquent, le coût des installations étant financé par la vente d’oxygène et d’azote.
Chose suffisamment rare pour être soulignée, nous disposons avec Air Liquide d’un industriel hexagonal dont les volumes d’affaires sont suffisamment importants pour lui permettre d’écraser la concurrence internationale grâce aux économies d’échelle.
Alors que nous nous étions plutôt habitués, ces dernières années, à voir les industries lourdes se concentrer auprès d’acteurs américains ou asiatiques, Air Liquide a pu concevoir – et financer – un projet industriel d’ampleur rarement égalée sur la scène internationale. Si le déploiement se passe sans encombre, les actionnaires d’Air Liquide pourront compter sur l’essor de l’hydrogène-énergie pour augmenter significativement le volume d’affaires du groupe.
Voulu sur le papier par les Etats-Unis, l’Europe, et la Chine, le secteur de l’hydrogène-énergie est prêt à passer à l’étape industrielle. Si Air Liquide fait ses preuves à Baytown, le groupe pourra être présent sur les innombrables sites de production d’ammoniac qui ne manqueront pas de se multiplier d’ici à 2030.
Si l’ammoniac est mieux que l’hydrogène alors ont peut utiliser l’urine humaine et animale et certains végétaux
IL MANQUE UN BOUT DE L’EXPLICATION; COMMENT L’AMMONIAC EST IL UTILISE COMME ENERGIE?
NH3->H2
L’hydrogène combiné avec l’azote devient de l’ammoniac, qui peut à faible pression, 7 bars alimenter un moteur thermique classique à essence, sans aucunes pollutions, et avec un rendement multiplié par 5-7 par rapport à l’essence.
PS :cela fait des années que je me demande quand on s’y mettra.
Heureusement que tu as fait pression, ils ont fini par t’entendre
Je suis fou, mais une idée me viens.
Cela sera extrait de l’air ambiant.
Super, nous aurons de l’énergie!
Mais pourrons nous encore respirer?
Je ne pense pas que l’on verra une voiture fonctionnant à l’ammoniac en France, car la réglementation est très sévère concernant les véhicules « toxiques », encore plus que les normes européennes.
Sans compter que l’ammoniac est corrosif est qu’il faudra supprimer toutes les durites en caoutchouc, le cuivre et le nickel.
Plutôt pour la Chine ou les USA.
Je suis incapable de donner un avis
technique sur tout domaine industriel
ayant toujours été particulièrement
nulle en physique-chimie…
Mais pour moi, sur le plan économique
concernant Air Liquide, mon expérience
sur le long terme me permet d affirmer
qu Air Liquide est une fabuleuse pépite.
C’est ma valeur porte bonheur, la seule
que je n’ ai jamais vendue et toujours achetée depuis plus de vingt ans.Et j ai
fait de magnifiques plus values.
Bravo les Hommes et Femmes Air Liquide
Air Liquide, le placement bon père de famille. Jamais déçu depuis 25 ans pour ma part.
Comment as-tu fait des plus values si tu n’as jamais vendu ?