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Dassault Aviation prête à s’envoler ?

By 22 mars 2024No Comments

Signe de l’intérêt mondial pour l’aviation militaire, les produits du constructeur français ont vu leurs ventes augmenter en 2023. Mais Dassault Aviation ne fait pas que dans l’armement. Acteur majeur de l’aviation d’affaires et du transport, il possède des atouts qui, selon votre sensibilité évidemment, peuvent justifier un certain intérêt.

 

Au printemps 2023, alors qu’il devenait évident que la guerre en Ukraine ne serait pas une affaire de mois mais d’années, je vous indiquais que les valeurs de la défense risquaient logiquement de s’apprécier.

J’attirais notamment votre attention sur l’Allemand Rheinmetall, spécialisé dans la construction de chars, canons, mais aussi de munitions. J’écrivais, il y a presque un an jour pour jour : «les perspectives annoncées pour les prochaines années, qui étaient déjà alléchantes pour les actionnaires, pourraient donc n’être qu’un socle d’activité à mesure que le conflit en Ukraine se prolongera. » C’est exactement ce qui s’est produit, et les douze mois qui ont suivi cet article ont vu l’activité de l’industriel bondir.

En 2023, ses ventes ont augmenté de +12 %, dépassant les 7,1 Mds€. Le résultat opérationnel a cru encore plus vite, et s’établit à une encâblure du milliard d’euros (918 M€) après une progression de 19 %. Le carnet de commandes s’est envolé de 44 %, passant de 26 Mds€ fin 2022 à 38,3 Mds€ fin 2023.

La Bourse n’a pas boudé cette hausse d’activité, et le titre a vu son cours progresser de 65 %, passant de 270 € en mars 2023, à plus de 444 € après l’annonce des résultats.

Aujourd’hui, la Bourse valorise généreusement cet acteur majeur de l’industrie de l’armement. Le marché est-il entré dans une phase de bulle comme sur les valeurs de la santé il y a trois ans ? Pas nécessairement, car la hausse maniaque n’a pas emporté toutes les valeurs du secteur.

Le français Dassault Aviation reste, par exemple, sur des multiples bien plus raisonnables que ceux de Rheinmetall.

 

Dassault Aviation : des ventes qui décollent

Le constructeur des avions de chasse Rafale et des jets privés Falcon a clôturé 2023 avec une croissance continue de ses ventes et une augmentation significative de son activité commerciale.

Le temps où le Rafale ne trouvait pas preneur à l’export et où la France devait, avec ses seules commandes, faire tourner les ateliers de l’avionneur, est bel et bien révolu. Signe de l’intérêt mondial croissant pour l’avion de chasse, une commande supplémentaire de 18 Rafale pour l’Indonésie a été passée le 8 janvier 2024, après la clôture des comptes 2023. Dernière étape de la commande initiale prévue pour 42 appareils dont le montant s’élève à plus de 8 Mds€, elle devrait apporter 2,1 Mds€ à l’avionneur.

 

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Le retour des conflits entre grandes puissances militaires a relancé la course à l’achat de chasseurs. Photo : Dassault

 

La fin d’année a également été marquée par l’obtention de la certification par les instances américaines (FAA) et européennes (EASA) du nouveau Falcon 6X. Certifié à partir du 30 novembre 2023, l’avion d’affaires a pu être livré à son premier client le mois dernier.

 

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L’aviation privée fait aussi les affaires de Dassault. Photo : Dassault

 

Malgré un ralentissement des livraisons l’an passé du fait de problèmes d’approvisionnement, Dassault a réalisé un chiffre d’affaires annuel de 4,8 Mds€, et un résultat net ajusté de 886 M€ – un record dans son histoire.

En fin d’année, le carnet de commandes du constructeur s’est établi à une encâblure des 300 appareils, totalisant très exactement 295 réservations (141 Rafale Export, 70 Rafale France et 84 Falcon).

Des actifs totalement ignorés par le marché

Fabriquer des avions n’est pas l’unique source de richesse du groupe.

Dassault Aviation possède également une participation massive dans l’électronicien Thales. Il en détient même un quart du capital, soit l’équivalent de la participation de l’Etat français. Or, Thales fait partie des success stories de la Bourse parisienne.

Présent dans plus de 75 pays et fort de ses 77 000 employés, l’équipementier très implanté dans le transport, la défense, l’espace et l’aviation civile connaît lui aussi une croissance insolente de son activité.

Son chiffre d’affaires a atteint les 18,4 Mds€ l’an passé, en croissance organique de +10,9 %. Avec une génération de cash-flow libre dépassant les 2 Mds€, il a pu dégager un résultat net ajusté de plus de 1,76 Md€, en hausse de +14 % sur un an.

Fort naturellement, cette performance s’est retrouvée dans le cours de l’action Thales, qui s’est octroyé +14 % sur un an, poussant la capitalisation boursière vers les 31 Mds€ début mars.

Mécaniquement, la participation de Dassault dans Thales a vu sa valeur augmenter d’autant, jusqu’à lui faire atteindre les 8 Mds€.

En outre, Dassault Aviation fait partie des rares entreprises à pouvoir faire état d’une généreuse trésorerie. Au 31 décembre 2023, les comptes faisaient apparaître une trésorerie disponible de plus de 7,29 Mds€ – une somme bienvenue, alors que le coût de l’argent augmente en flèche depuis deux ans.

Pour autant, le marché ignore totalement cette réserve d’actifs. La somme de la valeur de la participation dans Thales et de la trésorerie disponible dépasse désormais les 15,3 Mds€… soit quasiment la capitalisation boursière de Dassault !

Les marchés valorisent ainsi le groupe « à la casse », comme s’il avait vocation à ne plus jamais gagner d’argent, comme si sa seule perspective était de redistribuer ses actifs existants aux actionnaires, sans possibilité de créer de la richesse.

Ce pessimisme vient en contradiction totale avec les chiffres évoqués plus haut, et avec les perspectives du secteur. Lors de l’annonce des résultats, la direction a confirmé sa confiance dans la bonne tenue de l’activité cette année encore, avec un chiffre d’affaires qui devrait poursuivre sa hausse pour atteindre les 6 Mds€.

Dassault Aviation devrait continuer d’engranger des contrats dans les prochaines années, à mesure que les armées moderniseront leurs équipements. Et avec un nombre croissant de milliardaires sur la planète (passé de 1 200 à 2 700 entre 2012 et 2022), la demande en aviation d’affaires ne devrait pas se tarir.

L’action Dassault Aviation est injustement décotée. Le groupe est valorisé sur la base de multiples boursiers inférieurs à ceux de ses pairs, et la valeur de ses actifs (participation dans Thales et trésorerie) est supérieure à sa capitalisation boursière totale.

Alors que les indices français volent de sommet en sommet, le titre fait partie des rares valeurs encore abordables de la place parisienne.

Etienne Henri

Etienne Henri est titulaire d'un diplôme d'Ingénieur des Mines. Il débute sa carrière dans la recherche et développement pour l'industrie pétrolière, puis l'électronique grand public. Aujourd'hui dirigeant d'entreprise dans le secteur high-tech, il analyse de l'intérieur les opportunités d'investissement offertes par les entreprises innovantes et les grandes tendances du marché des nouvelles technologies.

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