Souvent considérée comme une contrainte pour les entreprises, la communication financière reste un élément clé de la relation avec les actionnaires et les futurs investisseurs. Pourtant, l’exercice peut se révéler risqué, notamment pour les small caps. Exemple ici avec Kalray, une tech française passée en quelques jours de « futur Nvidia » à valeur à fuir, du fait de résultats financiers moins bons que prévu…
Vous avez certainement déjà entendu le terme de guidance à propos des entreprises. Ce mot désigne tout simplement des prévisions ou encore des perspectives émises par les sociétés lors de leurs traditionnelles réunions d’analystes ou de leurs présentations de résultats.
Et à ce sujet, cela fait des années que je ne cesse de marteler le discours suivant : il ne faut pas, lorsqu’on est une petite capitalisation, se hasarder à publier des prévisions annuelles, au risque de se faire sévèrement tancer par les investisseurs.
Il me paraît en effet plus que dangereux de se heurter à des prévisions, d’autant qu’elles sont en général difficiles à réaliser. C’est différent dans le monde des sociétés du CAC40, où les directions financières sont habituées, avec leurs cohortes de salariés, à être les plus précises possible.
Souvent, dans les small caps, il y a beaucoup moins de monde, de sorte que les prévisions peuvent largement dériver des réalisations effectives.
Le Nvidia européen
Prenons par exemple le cas de Kalray (FR0010722819 – ALKAL).
Vous connaissez tous cette société française qui développe des processeurs spécialisés dans le traitement de grandes quantités d’informations. Un positionnement si porteur que certains faisaient déjà la comparaison plus que flatteuse avec Nvidia, la success story tech des marchés financiers.
Rien que ça.
Le processeur DPU de Kalray. Crédits photo : www.kalrayinc.com
Mais la réalité est bien différente.
La semaine dernière, le groupe a indiqué que son chiffre d’affaires annuel ne serait pas de 40 M€ comme attendu, mais plutôt de 30 M€.
En cause, des cycles de ventes plus longs qu’anticipé, notamment chez le partenaire américain Dell. Pour ne rien arranger, l’Ebitda sera à l’équilibre alors qu’on attendait un basculement dans le vert.
Cette annonce, conjuguée à celle d’une trésorerie passée d’une année sur l’autre de 23 M€ à 8 M€ pour cause de structuration du groupe, a causé une onde de choc sur la valeur, en recul de plus de 23 % en l’espace d’une semaine.
Les analystes ne sont pas dupes et révisent les uns après les autres les estimations de chiffre d’affaires. Seulement 50 M€ sont attendus l’an prochain, contre une prévision initiale de 80 M€… Les ratios boursiers de la société restent élevés en dépit de la forte baisse, avec encore une VE/Ebitda de l’ordre de 30 sur 2024.
Autant dire qu’il sera difficile d’anticiper un fort rebond du cours boursier, surtout dans la période actuelle, peu favorable aux petites capitalisations.
Plus que jamais, il faut arrêter les prévisions en tout genre quand on est une small cap… L’exemple de Kalray est particulièrement symptomatique des dangers qu’elles comportent.