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Wall Street : les records continuent de pleuvoir… et la déconnexion du réel de s’intensifier

By 25 janvier 2021One Comment
Le Nasdaq et le Russell-2000 ont plus que jamais le vent dans le dos. Merci la spéculation et la manipulation boursière !

Depuis début décembre, les spéculateurs ne veulent plus des GAFAM, parce qu’on ne fait pas bouger Google ou Microsoft avec des rumeurs… Pour autant, le Nasdaq continue de battre des records (il en a signé un troisième consécutif vendredi à 13 567 points), tandis que le Russell-2000, dont je vous parlais jeudi dernier, affiche déjà une hausse de 10% depuis le 1er janvier. Ce faisant, il s’inscrit depuis début novembre dernier sur une trajectoire de… +160% par an (si, si, vérifiez !).

Les investisseurs n’achètent pas non plus des « big caps » comme Coca-Cola ou ExxonMobil, l’une et l’autre ayant des problèmes juridiques. De même, ils boudent les banques de réseau, « coupables » de ne pas faire assez de marge, et seules les banques d’affaires ayant un profil de « hedge fund » comme Goldman Sachs et JPMorgan trouvent encore grâce à leurs yeux.

En fait, les titres en panne depuis le début de l’année sont ceux qui ne laisse aucune place à l’imagination, des valeurs dont on peut justifier un prix en se basant sur des fondamentaux, des ventes, des marges et/ou des prévisions annuelles. Il est devenu bien plus excitant d’inventer des contes de fées sur des microcaps qui ne valent et ne produisent rien, et d’entraîner toute une communauté crédule à se ruer sur une société qui pourrait produire une batterie capable de tenir 1,5 million de kilomètres dans une usine fonctionnant avec l’énergie d’un générateur à hydrogène d’ici 2025.

Ce n’est pas de l’investissement, c’est de la spéculation et de la manipulation boursière, ni plus ni moins, et en la matière, quand les liens avec le réel sont rompus, tout devient une question de « timing ».

Adieu la logique fondamentale

Ceux qui avaient acheté la « story » QuantumScape Corp en savent quelque chose et se frottent actuellement les mains. Cette action est passée de 11 à 132 $ entre le 1er novembre et le 22 décembre, avant de retomber sous les 50 $ en moins de dix séances, niveau sur laquelle elle stagner depuis trois semaines. Le décollage vertical du titre avait d’abord affolé les programmes qui font de « la chasse au momentum » (c’est-à-dire aux titres affichant une vélocité haussière élevée), avant que les vendeurs à découvert ne détectent l’anomalie de valorisation, le chiffre d’affaire de l’entreprise étant proche de zéro. Ils ont en conséquence pris des positions « short », mais se sont faits « déchirer », encore et encore, avec une multiplication complètement absurde du cours par 4 puis 7, puis 10, etc. 

Car même s’ils sont sûrs de la pertinence de leur analyse, le « money management » leur interdit de supporter une perte potentielle supérieure au gain qu’ils espèrent réaliser, ce qui les oblige à se racheter, en mode panique dans le cas présent… Or, lorsqu’il n’y a plus de titres à emprunter sur le marché, le seul prêteur potentiel est le propriétaire de l’entreprise en question, qui engrange ainsi les fonds lui permettant d’échapper au tribunal de commerce.

Les ventes de leurs titres par les dirigeants d’entreprises « insider selling » ont atteint un maximum historique en volume et en valeur fin décembre, mais ce record pourrait encore être battu ce mois-ci. Et s’ils annoncent se reconvertir (grâce à cet argent littéralement tombé du ciel) dans le trading sur les cryptodevises, il en découle une nouvelle hystérie haussière car il existe aussi des programmes qui ciblent les prétendus futurs champions de la « blockchain ». Si la raison sociale comporte un mot clé évoquant l’univers des cryptos ou les « registres partagés », c’est tout bon !

Prends l’oseille et tire-toi !

Le moyen le plus efficace pour un dirigeant d’emballer Wall Street est de claironner que la trésorerie de sa société sera désormais investie en bitcoin au lieu de Bons du Trésor. Ladite société aura beau réaliser zéro chiffre d’affaire ou même crouler sous les pertes, elle devient du jour au lendemain un « proxi » du bitcoin, commençant par refléter sa hausse stratosphérique… avant de replonger dans les mêmes proportions que le sous-jacent.

Mais cela n’a aucune importance car les « dirigeants » ont déjà appliqué l’adage « prends l’oseille et tire-toi » et peuvent prendre leur retraite à 23 ans, avant même d’avoir terminé leur cycle d’étude et alors même que ces entreprises ne sont souvent que des coquilles juridiques destinées à récolter des fonds pour racheter ensuite des entreprises ayant un vrai métier, grâce à des stratégies à effet de levier, pour un coût financier nul puisque l’argent est gratuit et va le rester au cours des 24 prochains mois.

Nous voici donc entrés de plain-pied dans le stade ultime d’une bulle spéculative, lequel n’avait plus été atteint depuis l’An 2000 où plus une entreprise brûlait de cash et s’enfonçait dans le rouge, plus elle semblait prometteuse.

Les investisseurs font le pari que « cette fois, c’est différent » parce que la FED ne peut pas se permettre de voir les faillites se multiplier parmi les technos qui font rêver, au risque de voir les indices s’engager dans une spirale baissière incontrôlable. Sauf que le Nasdaq compte aujourd’hui bien plus de « joueurs virtuels » que de techno fans en chair et en os, et que ces nouveaux venus en Bourse, qui misent leur chèque fédéral de 2 000 $ comme s’ils prenaient des paris en ligne, s’en remettent à des « automates » qui assurent la gestion des positions en fonction d’un unique référent qui est le prix… ce qui est la base de l’analyse technique.

Si ça baisse, et même si la Réserve fédérale américaine se sent obligée de renflouer certaines licornes dont elle détient une partie de la dette (pour éviter de tout perdre), d’injecter encore plus de morphine monétaire, les trend followers voudront que ça baisse bien davantage…

Quant à ceux qui voudront continuer de croire à la hausse, ils n’auront qu’une obsession : réduire les leviers pour limiter la casse, renforçant à leur tour les spirales baissières.

Philippe Bechade

Rédacteur en chef de « La Bourse au Quotidien » et de la lettre « Béchade confidentiel », Philippe Béchade rédige depuis 2002 des chroniques macroéconomiques et boursières. Il est également l’auteur d’un essai, "Fake News", qui fait office de manuel de réinformation sur les marchés financiers. Arbitragiste de formation, analyste technique, il fut en France dès 1986 l’un des tout premiers traders et formateur sur les marchés à terme. Intervenant régulier sur BFM Business depuis 1995, rédacteur et analyste contrarien, il s'efforce de promouvoir une analyse humaniste, impertinente et prospective de l’actualité économique et géopolitique.

1 commentaire

  • Avatar le chinois dit :

    Le News le plus importante de 2021 : Gordon Brown: UK could become a ‘failed state’ without reform . /Politico /
    Ceux qui ont espéré de récupérer  » la G B comme avant « ,ont de fait mis en pièce le vieux pays. On ne peut jamais
    retourner a un état antérieur, l’Histoire c’est marche ou crève, peut il avoir pays ahistorique ? He,français ?
    La rêve des rentiers et les bureaucrates : dormir .
    Ce que l’article curieusement ne dit pas ,que Brown propose de supprimer la Chambre des Lords et remplacer
    par un Sénat des Régions.
    La question est apparue, l’Angleterre ne peut ne pas répondre.
    La G B inerte satellite des deux Unions .

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