Comme après chaque séance des 3 et 4 sorcières, Philippe Béchade dresse le bilan. Côté US, l’accumulation de records toujours plus vertigineuse et la prochaine annonce d’un tapering inquiètent…
Imaginez une fin de match de basket, où à l’issue du troisième quart temps, l’une des équipes mène avec un écart écrasant. Vous en conviendrez, l’attitude des équipes pendant les toutes dernières minutes s’avère décevante. En effet, ces derniers instants sur le terrain sont empreints d’un net relâchement – spécialement par l’équipe qui mène.
Maintenant reprenez cette métaphore et replacez-là dans la sphère boursière.
Parce qu’il en est allé de même lors de la dizaine de séances qui a précédé celle des 4 sorcières.
La « bull team » a inscrit 28 records absolus au T3 sur le S&P500. Et de façon surprenante, le scénario du 17 septembre a, d’une certaine façon, ressemblé à celui du 18 juin dernier puisque le CAC40 ou l’EuroStoxx50 ont enregistré un écart de 2,2% entre le zénith et le plus bas du jour (6 697/6 552 points pour le CAC40, 4 213/4 119 pour l’Euro-Stoxx50).
La Bourse de Paris achevait ainsi de reperdre ses derniers gains depuis le 18 juin : le trimestre écoulé se solde par un coup pour rien (6 568/6 570 points). Et l’EuroStoxx50 conserve une avance symbolique de 1,2%, à 4 131 points.
Quel contraste avec le Nasdaq qui engrange +8% sur le trimestre écoulé et le S&P500 affiche un très honorable +6,5%. L’Europe a été spectaculairement surclassée durant tout l’été.
Shutdown annoncé ?
Et malgré une baisse de régime depuis le 2 septembre (pour le S&P500 qui culminait à 4 545) et depuis le 9 septembre pour le Nasdaq (et un ultime record à 15 400 points), Wall Street n’a en fait pas perdu de terrain par rapport à l’Europe qui a fini le trimestre un peu sur les rotules.
Et cela ne s’est pas arrangé sur le finish ! Le CAC40 finissait la semaine en repli de -1,6% tandis que le Dow Jones a bien failli conclure la semaine sur une hausse : il n’a basculé dans le rouge qu’en fin de séance, et ne cède que -0,07% d’un vendredi sur l’autre. Wall Street a pris une revanche éclatante après avoir été légèrement mené à la marque au 2ème trimestre (+6% pour le S&P500, +6,5% pour l’EuroStoxx50).
La lourdeur observée depuis une dizaine de jours à Wall Street s’explique par une accumulation de facteurs dont l’impact est individuellement difficile à évaluer.
Nous citerons la crainte récurrente de voir la politique monétaire de la Réserve fédérale se durcir dès le mois de novembre. Réponse de la FED ce mercredi vers 20 heures.
Il y a aussi le risque de « shutdown » brandi par Janet Yellen alors que le plafond de la dette US est désormais atteint. Cela pourrait déboucher sur le non-paiement de certaines catégories de fonctionnaires.
Le Congrès semble par ailleurs sérieusement divisé sur le collectif budgétaire de 3 500 Mds$ de Joe Biden. Les démocrates ne disposent que d’une majorité d’une voix au Sénat et pourrait perdre cet avantage si un seul de ses membres s’abstenait… ou était absent lors du vote.
Pour tenter de rassurer ses propres troupes sur la question du creusement des déficits liés à des plans de relance très « ambitieux » – enfin, surtout très coûteux et générant des déficits abyssaux –, Joe Biden est revenu à la charge sur la question de l’alourdissement de la fiscalité des entreprises et des plus riches. Résultats : les gains boursiers pourraient être plus fortement taxés.
Et nous sommes curieux de savoir si les +40% de plus-values boursières réalisées par Jerome Powell en 2020 (soit +25 M$) y seront soumises.
Aussi, pour évaluer la fortune (ou une partie de la fortune) de Jerome Powell, une petite règle de 3 nous permet de la situer autour de 65 M$.
Bien sûr, ces gains ne sont en aucun cas soupçonnés de relever du délit d’initié et constituent la juste récompense de prises de risques calculés dans un environnement monétaire heureusement demeuré favorable. Mais Jerome Powell a dû avoir très chaud. La FED pourrait à tout moment annoncer le début d’un « tapering », ce qui ne manquerait pas de contrarier Wall Street.
Nous espérons pour le patron de la FED qu’il est bien couvert par quelques puts… A moins que par solidarité avec Robert Kaplan, Thomas Barkin et Eric Rosengren, il se résolve à vendre son portefeuille – certes, au plus haut de l’histoire –, mais qui peut exclure que le funiculaire haussier prenne le chemin des 5 000 points sur le S&P500 d’ici Noël ?
Bien évidemment, si les 4 sorciers Jerome Powell, Thomas Barkin, Robert Kaplan et Eric Rosengren sortent (ou sont déjà sortis ?) du marché, cela ne devrait pas beaucoup les chagriner de voir le S&P500 retomber vers 4 000 points pour le quatrième quart temps… mais cela réduirait le gain annuel à +7%, contre +20% le 2 septembre dernier.
On ne dira jamais assez : protégez-vous…