+131 % en Bourse en moins de deux ans, un résultat net trimestriel multiplié par 2,4, et un rendement de 8 % pour les actionnaires : la Société Générale est en train de signer un spectaculaire retour en grâce. Longtemps boudée par les marchés, la banque tricolore redresse la barre depuis l’arrivée aux fonctions de son directeur général Slawomir Krupa. Décryptage d’un redressement qui fait mentir les sceptiques.
C’était il y a moins de deux ans. Une période courte pour tout un chacun mais une éternité à l’échelle de la Bourse et du trading à la journée. En septembre 2023, le nouveau patron de la Société Générale, Slawomir Krupa, dévoilait son plan stratégique pour rendre à la banque rouge et noire ses lettres de noblesse.
Mais ce jour-là, rien ne s’est passé comme prévu. Alors que les analystes étaient plutôt optimistes suite à l’arrivée d’un nouveau Directeur Général pour remplacer Frédéric Oudéa, (dont le mandat de quinze ans semblait avoir atteint ses limites), l’annonce du nouveau plan stratégique a causé une dégringolade boursière.
Malgré le soutien de 99 % des actionnaires lors de l’intronisation du nouveau DG, et en dépit de la présentation d’un plan qui n’avait rien d’iconoclaste, la Bourse a sévèrement sanctionné le dossier. Ce jour-là, le titre abandonnait 13 %, ce qui l’a refait plonger sous le niveau qu’il avait lors de la prise de fonctions du nouveau dirigeant.
L’action Société Générale a ensuite été ballottée autour des 24 €, alors que la transformation de la banque ne se matérialisait pas encore dans les résultats. Durant l’été 2024, le titre s’est même replié sous les 20 €, et de nombreux analystes ont commencé à comparer la vénérable banque à Atos, Orpea, et tous les autres fleurons français devenus des « value traps ».
Mais pour les actionnaires au long cours, la patience a fini par payer. Le long purgatoire s’est achevé en début d’année 2025 avec la cassure à la hausse des 28 €, qui a propulsé le titre à plus de 44 €, avant une nouvelle vague haussière à l’assaut des 50 €.
Après l’avoir délaissée, le marché s’arrache l’action Société Générale. Infographie : TradingView
Les investisseurs patients qui ont acheté l’action lors de l’arrivée de Slawomir Krupa le 23 mai 2023 ont pu doubler leur mise en moins de deux ans. Mieux encore, le groupe bancaire n’ayant jamais cessé la distribution de dividendes, la plus-value, dividendes réinvestis, dépasse, à l’écriture de ces lignes, les +131 %.
Et si prendre une partie de ses gains après une telle hausse n’est jamais une mauvaise affaire, les actionnaires peuvent encore se féliciter de constater que les fondamentaux se sont améliorés encore plus vite que le cours de l’action, laissant espérer une poursuite de la hausse à moyen terme.
Les résultats tangibles du « plan Krupa »
Après un exercice 2023 qui n’avait rien de reluisant, la Société Générale a vu son activité et sa rentabilité s’améliorer fortement à la fin de l’année dernière. Grâce à la politique de réduction des coûts, les charges d’exploitation sont restées stables en 2024 tandis que le chiffre d’affaires s’envolait.
Grâce à cet effet ciseaux favorable, le résultat net a largement progressé sur le dernier exercice, bondissant de 70 % pour atteindre les 4,2 Mds€. La politique de redistribution volontariste des bénéfices, de 40 % du résultat net, a fait le reste : les actionnaires ont récupéré au titre de l’exercice 2024 2,18 € par action (50 % en dividendes, 50 % en rachat d’actions). Cette rémunération, représentant 8 % de la valeur du titre au 1er janvier 2024 a soutenu les cours, et la promesse qu’elle évoluerait avec la hausse des bénéfices a fait briller les yeux des actionnaires.
Les résultats du premier trimestre sont venus confirmer que le pari était gagnant. Hors cessions d’actifs, les revenus trimestriels ont augmenté de 10,2 % sur un an. Dans le même temps, la réduction des coûts s’est accélérée avec une baisse de -4,4 % des frais de gestion à périmètre constant – une performance très en avance sur les objectifs 2025, qui ne tablaient que sur une baisse de -1 % sur l’année.
Cet hiver encore, la hausse du volume d’affaires couplée à la baisse des frais de fonctionnement ont conduit à une hausse explosive des bénéfices. Sur le dernier trimestre, le résultat net part du groupe a été multiplié par 2,4, dépassant les 1,6 Md€.
La banque a ainsi généré, sur le seul premier trimestre 2025, l’équivalent de 64 % des bénéfices encaissés sur la totalité de l’année 2023.
La Société Générale repousse ses limites
Avec une rentabilité (ROTE) qui s’affiche désormais à 11 % contre 4,2 % en mai 2023, Slawomir Krupa peut se féliciter d’avoir réussi à redresser la trajectoire d’un paquebot qui ne faisait plus rêver les investisseurs.
Grâce à ses cessions d’actifs récentes, la banque est aujourd’hui parmi les mieux capitalisées du continent. Le ratio de CET1, qui mesure la solidité d’une banque par rapport à ses engagements, s’établit à 13,4 %, soit près de 30 % de plus que ce que n’imposent les exigences règlementaires. Les agences de notation continuent d’ailleurs d’accorder une bonne note à la dette du groupe, avec une notation A- chez Fitch, A1 chez Moody’s, et A chez S&P Global Ratings.
Au deuxième trimestre, le rebond de la banque de détail devrait se poursuivre, rendant l’objectif de hausse de 3 % des revenus sur l’année tout à fait crédible. En plus de la hausse attendue des bénéfices, les actionnaires seront de mieux en mieux rémunérés avec un taux de distribution qui passera de 40 % à 50 % du résultat net.
De quoi justifier de mettre l’action en fond de PEA pour profiter de manière défiscalisée des dividendes à venir – quitte à attendre un repli vers les 40 € pour éviter de surpayer le titre, qui est venu tutoyer les 50 € la semaine dernière.