Connaissez-vous le Norway Summit ? Il s’agit de la conférence annuelle phare de la fédération norvégienne d’échecs. Depuis 2016, cet événement prestigieux rassemble les esprits les plus brillants du monde entier – penseurs, innovateurs, investisseurs et décideurs – pour explorer les synergies entre technologie, innovation et économie. James Altucher a eu la chance d’y assister et il a tenu à partager avec vous les conseils qui lui ont permis d’améliorer sa stratégie d’investissement…
Imaginez que [les conférences] TED (« Technology, Entertainment and Design ») et le forum de Davos s’incrustent dans un tournoi d’échecs.
Cela vous semble improbable ? Et pourtant, ça existe !
Récemment, j’ai été convié au Norway Summit, la conférence annuelle organisée par Norway Chess [NDLR : la fédération norvégienne de tournois d’échecs].
Cette année, je faisais partie des modérateurs. Une fois de plus … C’était la troisième fois. Je n’ai toujours pas été viré.
Le Norway Summit rassemble les esprits les plus brillants de l’IA, de l’énergie et de l’innovation, et un tournoi d’échecs se déroule en marge.
En haut : le champion Magnus Carlsen plongé dans ses réflexions
En bas : J’essaie de suivre le rythme de Vishy Anand, cinq fois champion du monde.
A première vue, c’est un drôle d’assemblage.
Les échecs, c’est de la stratégie, de l’identification de schémas. Il faut savoir à quel moment faire volte-face. C’est un peu comme gérer l’IA, les marchés, et le chaos qui peut survenir à tout moment.
J’ai inauguré l’évènement avec un discours intitulé « Soyez Stupide ».
Quelle était l’idée ?
Le monde évolue trop vite. L’IA, les cryptomonnaies, l’énergie, la robotique, la finance : tout évolue à la vitesse de la lumière. Les experts sont déroutés, et ceux qui font preuve d’assurance se trompent en général.
Et dans cet environnement, être stupide est la chose la plus difficile et la plus intelligente que vous puissiez faire.
Mais oublions un peu mon discours.
Quel a été le moment fort de cette rencontre ?
Ce fut sans conteste ma conversation à bâtons rompus avec Vishy Anand. A la cinquantaine, il se classe toujours parmi les meilleurs joueurs d’échecs du monde.
Nous avons eu l’occasion d’aborder des thèmes variés : le vieillissement, l’évolution, et comment rester au plus haut niveau dans un monde qui change de plus en plus vite.
Et ce qu’il m’a dit est si important que je vais le partager avec vous.
Nous n’avons pas parlé que d’échecs. Nous avons aussi discuté de la façon dont on pouvait « rester dans le coup », quand tout ce qui nous entoure essaie de nous rendre obsolète.
Voici ce que j’ai appris…
- L’autosatisfaction tue, même au sommet
Après qu’il a remporté son premier titre mondial, la performance de Vishy s’est dégradée, non parce qu’il a arrêté de travailler, mais parce qu’il ne se fixait pas les bons objectifs.
« Vous pouvez travailler dur et vous faire tout de même distancer », a-t-il dit. Il ne s’agit pas uniquement de travailler dur, mais de vous focaliser sur l’innovation, sur ce qui est en train de changer.
- La psychologie et les compétences sont imbriquées
Quand il était jeune, il jouait vite car il ne se doutait pas de ce qui pouvait mal tourner.
Etait-ce de la confiance aveugle ? Non. En réalité, c’est un super pouvoir. L’astuce, en prenant de l’âge, c’est de ne pas laisser la sagesse se transformer en hésitation.
- Le jeu change. Vous devez changer vous aussi
Le monde des échecs est devenu plus agile. Les ouvertures ont changé. Les moteurs d’échecs [NDLR : programmes contenant le code informatique et l’algorithme qui calculent le meilleur coup dans une position donnée] sont devenus plus intelligents. Les vieux trucs ont cessé de fonctionner.
Cela vous dit quelque chose ? Non ?
Eh bien c’est exactement ce qui se passe dans tous les secteurs depuis l’arrivée de l’IA.
Face à cette situation, Vishy ne s’est pas lamenté. Il s’est mis à la page.
« J’ai dû renoncer à des hypothèses dont je ne soupçonnais même pas l’existence. »
Cela donne une idée de l’ampleur de cette reprogrammation.
- La jeunesse n’est pas une question d’âge mais de confiance
Les jeunes joueurs ne sont pas forcément meilleurs : c’est juste qu’ils ne sont pas « plombés » par ce qui a déjà échoué. Ils partent du principe que les choses vont marcher. Et donc ils osent davantage. C’est ce qui fait qu’ils gagnent davantage.
Boom ! Et voilà. L’optimisme est une stratégie. Et pas qu’aux échecs.
La question, c’est comment survivre dans une partie qui est en train de changer, quand on vous coupe l’herbe sous le pied.
Qu’il s’agisse de startups, d’investissements, d’écriture ou de se réinventer professionnellement à 52 ans, l’astuce ne consiste pas seulement à apprendre de nouveaux coups mais à oublier les anciens, ceux qui vous retiennent.
Ecoutez tout l’entretien (vous pouvez accéder à la version originale en cliquant ici). Cela vaut la peine, vu tout ce qu’il y partage avec nous.
Merci, Vishy. Pour la sagesse. Pour l’humilité.
Et merci à la Norvège !
